La vie extraordinaire d'une chanteuse normale.
28 Février 2018
Je ne sais pas ce qu’il s’est passé pendant mon absence mais le lendemain matin ...
Le matin du deuxième jour donc, c’est toute seule que je me suis octroyée ma propre crise cardiaque.
Nous avions prévu de quitter notre lieu de villégiature à 8h20 précises pour arriver à Paul Fort à 8h45 dans le but de démarrer la répétition à 9h00 pile.
Ceci car nous sommes des professionnels du spectacle, fiables, honnêtes et bien organisés.
Malheureusement tout ne s’est pas passé tout à fait comme on l’avait imaginé.
Lorsque mon réveil-iPhone, a sonné, j’ai constaté avec horreur qu’il était déjà 8h15.
8h15 !
Et non pas 7h15 comme j’avais cru le programmer la veille au soir.
8h15.
Oh la vache !
8h15 et on doit partir à 8h20.
Oh purée !
8h15 et je suis en pyjama.
8h15 et tout le monde dort autour de moi.
J’ai pris une minute pour réfléchir.
8h16.
Comment procéder pour qu’en 4 minutes tout le monde soit habillé, propre et en bon état de fonctionnement dans la voiture ?
8h17.
Peut être qu’il y avait trop d’étapes... j’ai enlevé « propre » et j’ai recommencé à réfléchir.
Comment faire pour qu’en 3 minutes tout le monde soit habillé et en bon état de fonctionnement dans la voiture ?
8h18.
J’enlevais directement deux étapes : comment faire pour qu’en deux minutes tout le monde soit dans la voiture ?
8h19.
J’ai pas trouvé la solution, vraiment pas. J’ai préféré abandonner ce projet insensé et j’ai accepté l’idée qu’on parte en retard même si ça m’énervait par avance.
Seule dans mon énervement, comme il n’était que 8h19, je me suis dit que j’allais m’octroyer une minute de pleine conscience pour faire descendre mon niveau de stress qui était monté beaucoup trop haut pour un mardi matin où je n’avais ni enfant, ni sac de piscine, ni goûter à gérer.
Je me suis mise en demi-lotus et j’ai écouté ma respiration pendant une minute.
À 8h20, foutu pour foutu, mais détendue, je me suis dit que le mieux ce serait maintenant d’œuvrer pour le bien être d’autrui. Je suis donc allée faire du café pour tout le monde.
À 8h21, je suis allée réveiller Morvan.
Visiblement, il s’était couché peu de temps auparavant et dans un état proche de … proche de …. de l’Amérique on va dire.
A voir sa difficulté pour ouvrir les yeux et pour aligner trois mots qui auraient pu former une phrase cohérente, je me suis dit soit il a fait un avc, soit il est encore bourré.
Heureusement, c’était la deuxième solution.
Quand je lui ai demandé ce qu’ils avaient trafiqué dans le salon toute la nuit pour se coucher aussi tard, il n’a pas trop su quoi me répondre, je voyais bien qu’il cherchait quelque chose d’intelligent à me dire, mais curieusement, ça ne venait pas.
Il a fini par bredouiller : "c’était uniquement professionnel, je te jure !"
Ouais …
Professionnel ….
Et ta tête ce matin, elle est professionnelle aussi ?
Je lui ai quand même demandé à tout hasard si la troisième set liste était venue au cour de la soirée.
Et apparemment non.
Finalement, 10 minutes plus tard, et contre toute attente, tout le monde était dans la voiture et, croyez le ou non, les bouchons nantais nous ayant épargnés ce jour là, nous sommes arrivés à Paul Fort à 8h55.
Un genre de miracle.
À 9h00 tapantes l’équipe artistique de L’Alliance au grand complet était autour de la table des loges pour la première réunion de chantier présidée par moi, la chef de projet chargée de mission de création.
J’ai pris une grande inspiration et j’ai pris la parole.
J’ai commencé par présenter tout le monde à tout le monde car si je connaissais tout le monde, tout le monde ne connaissait pas tout le monde.
Ensuite j’ai posé les objectifs, exposé la marche à suivre tout en redéfinissant la structure du projet. J’étais très claire dans mes propos alors que je m’étais réveillée trois quart d’heure auparavant, que je n’avais vraiment pas assez dormi tout ayant bu un peu trop.
Une belle performance !
J’aurais adoré que Nico Berton ou ma mère (ce qui parfois, pour moi, est un peu pareil) me voit faire ça. Ils auraient été très fiers, voire impressionnés, par tant d’aplomb.
Mais Nico n’arrivait qu’à 13h, ce qui est l’heure de la pause et ma mère ne venait pas à la résidence, ce qui est normal.
Tout le monde m’écoutait religieusement. Morvan avait les yeux de plus en plus ouverts à mesure que son taux d’alcoolémie descendait.
J’avais bon espoir qu’il retrouve son état normal en début d’après midi.
En conclusion de ce petit laïus, j’ai formulé de manière très simple le but à atteindre : "Nous allons créer ensemble un concert extraordinaire."
C’était net, précis, sans fioritures.
Tout le monde était désormais au courant de ce qui allait se passer entre nous.
Et nous sommes montés travailler sur le plateau.
A 13h, le directeur de la salle nous a rejoints pour déjeuner.
Il s’est assis, comme par hasard, en face de Morvan-les-yeux-mi-clos.
Il aurait pu se mettre en face de n’importe qui d’autre, mais non, il a choisi de se mettre en face de Morvan et j’ai commencé à avoir une petite montée de stress.
J’avais peur que Morvan, n’ayant pas tout à fait retrouvé son état normal, soit victime d’un dérapage, comme cela peut parfois lui arriver.
La plupart du temps, je trouve ça touchant, mais là, je trouvais ça stressant.
Tout se passait bien, nous discutions de choses et d’autres, je veillais tout de même au grain et surveillais Morvan du coin de l’oeil.
Rendu au fromage, sans que je ne puisse rien contrôler, le directeur a dit à Morvan :
"Tu fais aussi de la musique à jeun ?"
Oh punaise !
La honte.
Morvan venait de se faire griller par le directeur.
Je suis restée sans bouger, mon brie de Meau à la main.
Mais, j’ai vite repris mon souffle car en entendant la réponse de Morvan j’ai compris qu’en réalité, ce n’était pas de "musique à jeun" dont parlait le directeur mais de musique cajun, ce qui n’est pas tout à fait pareil.
Ça m’a grandement soulagée.
En effet, Morvan fait de la musique cajun de temps en temps.
J’avais mal compris parce que j’étais fatiguée, c’est tout.
L’après-midi, nous avons commencé à réfléchir à nos placements sur le plateau chanson par chanson, histoire qu'il se passe des trucs d'un morceau à l'autre.
8 morceaux ont ainsi été décortiqués.
Le prototype du décor fut amené sur le plateau pour validation (ou non).
Par chance, il fut validé.
Nous avons également eu la visite de mon tourneur.
Ils sont arrivés (oui, ils, car mon tourneur, en fait, ils sont plusieurs), ils sont donc arrivés avec dans les bras un énorme carton de chez Thomann qui nous était destiné.
(Maman, Thomann c’est un magasin de matériel de musique en ligne).
Et quand t’es musicien, recevoir un énorme carton de chez thomann, c’est toujours la méga-fête.
A cet instant précis, j’ai quasiment vu un sourire sur le visage de Morvan.
C’est dire s’il était content !
Ce carton contenait tout le matériel qui allait nous permettre de faire ce concert extraordinaire dont je parle plus haut.
Avant de partir, Jérome, le patron m’a dit : "Ça te dirait, au mois de mai, d’aller jouer quelques titres à l’Olympia en première partie de François Morel ?"
J’ai dit que j’allais réfléchir.
Non, je déconne, j’ai dit oui !
Et ils sont partis.
Et je me suis dit que leur venue ce jour là avait été extrêmement positive.
En élargissant un peu, je me suis dit que leur venue dans ma vie professionnelle avait été extrêmement positive.
Je leur en suis très reconnaissante.
De ça, mais aussi de quelque chose que je vais bientôt avoir grand plaisir à vous annoncer. (à suivre...)
Sur ces belles pensées,
Je conclue cette journée,
Si vous l’avez aimée,
Je m’en trouve comblée.
Liz