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La vie extraordinaire d'une chanteuse normale.

LE BLOG DE LISE PRAT-CHERHAL

Un week-end sans concert

Un week-end sans concert

Ce week-end, c’était le premier week-end depuis fort fort longtemps (trois mois il me semble) où nous n’avions pas de concerts. 
Genre aucun concert. 
Ni le vendredi, ni le samedi, ni le dimanche. Pas de concert. 
Rien, nada, nothing, que dalle. 
Ainsi nous sommes restés chez nous du vendredi au dimanche inclu. 
C’était bizarre. 
Personnellement, j’étais un peu perdue, je ne savais plus trop ce qu’on faisait du vendredi soir au dimanche soir quand on était chez soi. 
J’avais pas de valise à préparer, pas de robe à laver, pas de feuille de route à imprimer. 
J’étais complètement désœuvrée. 
Le samedi matin je me suis demandée, ce qu’on faisait quand on était chez soi le samedi matin. 
Je me suis dit que le samedi matin, on allait sans doute acheter du pain. 
Alors je suis allée acheter du pain. 
Là bas, j’ai rencontré une amie. 
Elle était très surprise de me voir à la boulangerie un samedi. 
Je lui ai dit que moi aussi j’étais surprise d’être à la boulangerie un samedi et qu’en plus, je me sentais complètement perdue dans ce week-end sans concert. 
Elle a eu l’air de me comprendre. Je crois. 
Et puis, j’ai pris mon pain aux graines et je suis rentrée chez moi. 
C’est là que Morvan est entré en scène, par l’intermédiaire de mon nouveau téléphone dont je suis très contente. 
Il m’a proposé d’aller voir le match de handball d’un de ses enfants. 
Je ne sais plus lequel. 

Pas lequel enfant, enfin ! 
Lequel match ! 

Il avait un nom important, (toujours le match, pas l’enfant) comme « finale de championnat » où « le match des deux équipes invaincues », je ne sais plus exactement. 
Il y avait beaucoup de gens dans la petite tribune, c’était vraiment un match important. 
Alors, sur les bancs, tout le monde était excité comme en 1998. 
Par mimétisme, je l’étais aussi, Morvan moins, évidemment. 
J’applaudissais régulièrement et balançais de temps en temps des « allez Rezé !! » à la cantonade, comme ça, pour le plaisir de me sentir appartenir au groupe des supporters. 
Une femme très enthousiaste, assise à nos côtés, hurlait régulièrement « les bras, les gars, les bras ». 
Je n’ai pas compris pourquoi, mais cela participait grandement à transmettre notre soutien à l’équipe soutenue.

En voyant l’entraîneur de l’équipe soutenue faire les cents pas sur le bord du terrain et lancer des indications aux joueurs, je le trouvais extrêmement investi dans sa mission. 
J’ai demandé à Morvan si cet entraîneur c’était son métier d’être entraîneur ou si c’était juste son hobby. 
Il m’a répondu que oui, c’était son métier d’être entraîneur de hand. 
Incroyable, c’était son métier. 
(Ça m’a rappelé toutes les fois où on m’a demandé si chanteuse était mon vrai métier, même si ça arrive de moins en moins à mesure que mon visage se retrouve sur des couvertures de magazines nantais). 
On pouvait donc gagner sa vie en entraînant une équipe de hand, tout comme on gagnait sa vie en chantant des chansons. 
Je trouvais que ça, c’était une assez bonne nouvelle. 
Les buts s’enchaînaient les uns derrières les autres et à 25-25, Morvan s’est penché vers moi et m’a dit : 
- D’ailleurs, ça doit pas être simple comme métier, entraîneur de hand, t’imagines, tu bosses le soir, t’es pris tous les week-ends, tu fais des bornes pour les matchs. Franchement, je sais pas s'il a des enfants mais, pour la vie de famille, ça doit vraiment pas être simple à gérer.

Je l’ai laissé finir sa phrase. J’ai laissé passé trois secondes de silence (enfin, de silence ponctué par un « les bras, les gars, les bras »).
Et puis je l’ai regardé dans les yeux et je lui ai répété mot pour mot ce qu’il venait de me dire. 
.... pas simple ... bosser le soir .... pris tous les week-ends .... les bornes .... gérer les enfants .... vie de famille ... 

Il s’est rendu compte très vite où je voulais en venir. 

Je l’ai trouvé mignon de s’inquiéter pour la vie privée de l’entraîneur qui, apparemment, a une vie d’un même niveau de complexité que la nôtre. La bière en moins. Quoique. 

Et puis la sonnerie de fin de match a retenti. 
Nous sommes allés à la buvette pour trinquer à la victoire où se consoler de la défaite, je ne sais plus et de toute façon, peu importait... c’était un beau match, avec des beaux « les bras, les gars, les bras ». 
Et puis nous sommes rentrés. 
J’ai pensé au week-end prochain, et à ce qu’on pourrait y faire, et en consultant mon planning, je me suis rendue compte que le week-end prochain sera un week-end traditionnel car nous partons jouer « Lila et Pirates » dans la Sarthe. 
Et là-bas, avec mon bandeau à tête de mort, mon épée et mon micro HF, je serais à nouveau dans la normalité de ma vie, dans l’anormalité de ma vie.
Je vous embrasse, Morvan également, car même s’il ne l’exprime pas, il vous aime aussi.
Liz

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