La vie qui ne tient qu’à un fil reprend doucement son cours autour de moi.
Mon fils est chez son papa.
Je suis allongée. Parfois sur le lit, souvent sur le canapé.
Morvan frappe à la porte de notre chambre, et me dit très fort en me tendant des anti-douleurs :
- Madame Prat-Cherhal, c’est l’heure de vos médicaments.
Alors je souris.
Rire me fait mal.
J’ai le sternum fracturé.
Il va lui falloir 4 semaines pour se réparer.
Cette semaine, j’aurais dû être en train de promotionner mon disque et d’annoncer la mise en ligne imminente, jeudi 19 janvier, de mon clip « Fausse couche, vrai sang » ...
Mais il est en train de se passer quelque chose de complètement différent.
Tout autour de moi, il n’y a que l’accident.
Quand je ferme les yeux, je vois l’accident.
Quand j’ouvre les yeux, je vois l’accident.
Quand Morvan me parle, je vois l’accident.
Quand j’essaye de m’endormir, je vois l’accident.
Quand je mange, je vois l’accident.
Quand j’essaie de regarder un film, j’arrête car je vois l’accident.
Quand j’écris, j’écris à propos de l’accident.
Et tout le temps, j’entends le bruit du choc de l’accident.
Et je nous revois, je nous entends dans la voiture tournant, tournant, tournant …
Alors je vais faire de mon mieux pour tout de même assurer professionnellement… dans la mesure de mes capacités évidemment.
Ma priorité étant actuellement de retrouver toutes les capacités physiques que j’avais auparavant.
Sachez que j’ai lu tous vos messages et je vous en remercie infiniment.
Ce matin, j’ai reçu un appel de Yann Gaudin (les intermittents connaissent sûrement cet homme providentiel, qui démêle les dossiers compliqués des salariés du spectacle vivant).
Car quand j’ai compris qu’il y aurait sûrement un moment pendant lequel je serai dans l’impossibilité de pouvoir travailler, j’ai été effrayée.
Mais Yann est arrivé !
Il m’a tout expliqué concernant mon arrêt de travail et les indemnités.
Au bout du fil, il me disait régulièrement :
- Tu comprends ?
Je comprenais vaguement, car mon esprit depuis mercredi, s’embrouille très rapidement.
Quand je ne comprenais pas, il me répétait les mêmes choses calmement en utilisant un vocabulaire différent.
À la fin de notre entretien, il m’a assuré que j’avais tout son soutien.
Avec Yann Gaudin à mes côtés, tout va bien se passer même si, c’est avéré, il ne peut rien faire pour mon sternum fracturé.
Ensuite, j’ai raconté au téléphone cet entretien, à mon seul parent qui est encore vivant. Mon seul parent encore vivant, c’est ma maman.
Elle m’a dit :
- Yann Gaudin t’a aidée ?
J’ai dit :
- Oui. Exactement.
Elle me répondit :
- Alors envoie moi le lien de sa cagnotte. À mon tour, je vais l’aider à créer sa société, lui qui aide si bien les intermittents.
Je lui envoyai le lien.
Elle fit un virement.
Ci-joint une photo de moi-même prise aujourd’hui qui prouve que, bien qu’au lit, je suis réellement en vie.
Je vous embrasse, Morvan non, il n’est pas dispo, il prend très à cœur et avec beaucoup d’empathie son tout nouveau travail d’auxiliaire de vie.
Lise Prat-Cherhal Allongée